Jeûne et yoga, thème du jour 2 : s’alléger
En même temps que nous nettoyons, purifions, désencrassons notre corps et notre esprit durant un jeûne, nous pouvons nous désencombrer du superflu et de l’inutile, pour créer des espaces, pour créer un espace pur en soi, où il fait bon vivre (sukha). Quand nous vivons dans un tel espace, notre cœur s’en trouve aussi purifié et nous nous sentons bien.
Que signifie s’alléger ? De quoi m’alléger ? Pourquoi m’alléger ?
Nous sommes « conditionnés » pour remplir : notre cerveau, notre frigo, notre agenda, notre garde-robe… ce qui peut nous conduire à un encombrement, où les objets prennent toute la place, et à un « faux plein », dépourvu de sens ; à un sentiment de lourdeur, de trop plein.
Nous sommes même conditionnés pour remplir lorsque nous respirons. Si l’on vous demande de prendre une respiration, que ferez-vous spontanément ? Allez-vous inspirer ou expirer ? Si, comme la plupart, vous inspirez… vous commencez par remplir avant de vider. Le yoga nous invite d’abord à expirer, d’abord à vider, pour mieux remplir.
Nous sommes aussi conditionnés pour penser qu’en accumulant, nous serons plus heureux. Or dans un espace encombré, la circulation est difficile, l’esprit s’accroche à toutes les choses placées devant les yeux, il ne peut plus ni se reposer ni se concentrer. À quoi me sert-il d’accumuler « au cas où », non seulement des objets, mais aussi des lectures, des photos qui s’entassent dans mon ordinateur sans que je prenne le temps de les regarder ? À quoi me sert-il de m’encombrer la tête et la vie, bien au-delà des services rendus par les objets accumulés ? Toutes ces choses accumulées me nourrissent-elles vraiment ou m’encombrent-elles à la longue ? Et si je me mets à jeter, est-ce pour répondre au besoin de renouveler ce que je possède ou pour m’alléger ?
Nous pouvons nous séparer des choses que nous avons accumulées, qui nous encombrent, nous pouvons aussi alléger notre emploi du temps, prendre des pauses dans nos journées, ralentir quelques instants, laisser des trous dans notre agenda pour être disponible à soi, aux autres qui se présentent, à l’imprévu, faire une pause entre deux rendez-vous au lieu d’enchaîner, pour s’arrêter, en nous libérant de l’optimisation permanente. Nous pouvons être attentifs, faire un pas de côté, nous pouvons aussi jeûner. En faisant cela, nous formons des espaces disponibles pour accueillir l’essentiel : la joie, la beauté, les émotions, la réalité.
Christophe André parle de son expérience du jeûne dans Trois amis en quête de sagesse, p. 375-376, et de l’expérience d’allégement qu’il a vécue. Nous sommes conditionnés pour manger trois fois par jour, mais par le jeûne, nous faisons l’expérience que nous pouvons « arrêter de manger de temps en temps » : « J’ai fait l’expérience du jeûne, dit-il, très en lien avec la notion de dépouillement : on s’aperçoit qu’il est tout à fait possible de ne pas manger pendant quelque temps, que cela ne nous met pas en danger, ne nous fait pas souffrir, et qu’on acquiert une grande capacité de discernement sur notre rapport à la nourriture – on fait beaucoup mieux la différence entre la véritable faim et l’envie de manger parce que ça sent bon et que c’est beau, l’habitude parce que c’est l’heure, le plaisir parce qu’on est gourmand. Ce fut pour moi une sorte de laboratoire d’allégement, de renoncement, qui est allé bien au-delà du fait de jeûner ».
Faire de la place, se désencombrer, s’alléger et retrouver la simplicité du cœur en abandonnant la complexité de l’esprit.